La situation économique du Ghana, par le Chef du service économique de l’Ambassade de France à Accra

En exclusivité pour Convergence, Jean-Noël Blanc, conseiller économique de l’ambassade de France au Ghana, vous propose de revenir sur les particularités économiques, financières et minières de ce pays aux multiples attraits pour les investisseurs.

Cet article s’inscrit dans le cadre des Business Conferences and Meetings Africa Mining 2022, organisés par Convergence les 8 et 9 novembre 2022.

Le Ghana, un poids lourd de l’Afrique de l’Ouest

Avec un PIB s’élevant à 84 milliards de dollars en 2022, le Ghana est la deuxième économie de la CEDEAO, communauté des États de l’Afrique de l’Ouest, après le Nigéria. L’exploitation des matières premières (pétrole, gaz, or, cacao) et les services qui y sont liés constituent le premier revenu du Ghana. Dans ces secteurs, le pays est en pointe : il est désormais le deuxième producteur d’or en Afrique, après l’Afrique du Sud, et le deuxième producteur de cacao après la Côte d’Ivoire.

Avec 31,1 millions d’habitats, le Ghana est composé d’une population connectée, urbaine et éduquée ; 79% des Ghanéens sont alphabétisés (l’un des plus hauts taux de la région), 57% habite en ville et 58% a accès à internet.

Cependant, le Ghana dépend également pour beaucoup de deux facteurs externes difficilement maitrisables : les entrées de capitaux d’une part et les cours de matières premières de l’autre. Dans ce contexte, l’économie peine à se transformer structurellement. Pour tenter de solutionner ce problème, le Président actuel (N. Akufo Addo) a récemment lancé le programme « One district, one factory » pour industrialiser le pays, encore trop dépendant de la revente de matières premières. Le résultat demeure à venir face à une conjoncture économique en « décrochage » sévère.

Une situation économique instable

Comme beaucoup d’autres pays du sous-continent ouest-africain, le Ghana traverse actuellement une mauvaise passe économique, due aux conséquences du COVID 19 et de l’impact de la guerre en Ukraine sur les chaines de valeur. Si les indicateurs économiques clé du pays témoignent d’une situation très difficile financièrement, le plan d’aide du FMI (accord prévu avec le gouvernement ghanéen d’ici la fin d’année) ouvre des perspectives de rebond à moyen terme pour une économie véritablement en souffrance en 2022, sous réserve de mesures domestiques complémentaires.

Les Ghanéens doivent faire face à une inflation de 37% sur un an, allant jusqu’à 100% pour certains produits alimentaires. La monnaie (Le Cedi) s’est également effondrée de 40% face au dollar, 27% face à l’euro. La balance des paiements s’en trouve d’autant affectée que le règlement de la plupart des importations s’effectue en dollars. Enfin, la dette s’élèvera quant à elle à 100% du PIB selon la banque mondiale en fin d’année courante. Cet ensemble de constats défavorables ont amené les agences de notation à abaisser la note du Ghana, le pays ayant ainsi perdu son accès aux marchés financiers internationaux.

Une attractivité ghanéenne diminuée mais toujours réelle

Pour les opérateurs économiques, en dépit de la situation dégradée du pays, les atouts du Ghana demeurent suffisamment importants pour voir le pays comme une opportunité d’investissement.

Les perspectives de croissance demeurent relativement élevées, entre 3 et 4% pour 2022, en dépit de la crise financière. Les ressources naturelles du pays demeurent en deçà des capacités de production (en particulier pour l’or, les minéraux, le pétrole et les produits agricoles). Le Ghana se trouve par ailleurs être l’un des pays parmi les plus stables et démocratiques d’Afrique de l’Ouest et sans problème de sécurité.

Le Ghana est également un pays très digitalisé grâce à un réseau mobile très performant.

Enfin, le partenariat de développement économique avec l’Union européenne a été renforcé en 2021, offrant de nouvelles possibilités aux exportateurs de bénéficier de tarifs libéralisés.

Le Ghana, puissance aurifère

Au Ghana, anciennement « Gold Coast » sous la colonisation britannique, l’or représente quasiment 85% des ressources minérales. Le pays se place en sixième position mondiale dans le classement des extracteurs d’or, première en Afrique. On l’aura compris, le secteur aurifère joue un rôle très important dans l’économie ghanéenne, attirant à lui seul plus de la moitié des IDE et générant plus d’un tiers (41%) des revenus d’exportation. En outre, le secteur représente – selon le gouvernement ghanéen – 14% des revenus de taxation, 5% du PIB et 90% des matières minérales exportées. Les principales destinations de l’or ghanéen sont la Suisse, les Émirats Arabes Unis, l’Inde, la Turquie et l’Australie.

En 2021, la production ghanéenne d’or a diminué de 30% pour s’établir à 80 tonnes. À titre de comparaison, sur la même année, le Mali a produit 63 tonnes, le Burkina-Faso 45 tonnes et la Côte d’Ivoire 41 tonnes. Cette diminution est à relier à des difficultés rencontrées dans l’exploitation des grandes mines, mais aussi à une taxe de 3% imposée par l’État ; cette dernière a notamment mis en difficulté les plus petites exploitations, dont l’activité a chuté. À la fin du mois de juin 2022 cependant, les revenus aurifères du Ghana avaient augmenté de 13%, représentant un apport de 3 milliards de dollars au total depuis le début de l’année.

Les mines d’or sont principalement situées dans les régions de l’Ouest du pays. Les plus grands producteurs (principalement étrangers ; États-Unis, Canada, Australie, Royaume-Uni…) ont recours à des mines souterraines comme de surface, tandis que les plus modestes (activité réservée au Ghanéens) exploitent des alluvions minières.

Il existe également un volet illégal dans le secteur – mines « Galamsey » – principalement exploitées par des populations ghanéennes pauvres en partenariat avec des sociétés chinoises. Enfin, pour les autres minéraux, qui prennent une place pour l’instant négligeable dans la production nationale (manganèse, bauxite, diamant), des politiques sont développées afin d’augmenter leur exploitation à terme. C’est notamment le cas de la bauxite. De manière plus générale, le gouvernement central s’implique pleinement dans le développement et la régulation du secteur minier ghanéen, à travers plusieurs institutions dédiées.

Une politique d’investissement encadrée

Le Ghana Investment Promotion Centre est l’agence ghanéenne en charge de l’enregistrement des entreprises qui veulent s’établir au Ghana. Il est un point de passage obligé des investisseurs moyennant des conditions financières strictes, parmi lesquelles un seuil minimal d’investissements :

  • 200.000$ en cas de joint venture avec une société ghanéenne ;
  • 500.000$ pour une société étrangère ;
  • 1.00.000$ pour une société commerciale étrangère.

Des règles sont aussi en vigueur concernant la prise de participation de sociétés locales à la filiale créée (equity 10%) et la restriction d’emploi d’expatriés au prorata du nombre d’emplois réservés aux Ghanéens.

Pour le secteur plus spécifique des mines et en plus des règles édictées par le GIPC, les sociétés devront se conformer au Code minéral et minier ghanéen (mis à jour en 2020). La « Minerals Commission » est l’agence en charge de la régulation et de l’administration du secteur. Elle contrôle notamment le respect de l’obligation de « contenu local », c’est-à-dire le recours obligatoire à de sociétés locales pour les activités parallèles à l’exploitation directe.

En dépit d’une situation économique fortement dégradée en 2022, le Ghana demeure un pays qui mérite l’attention des investisseurs, au regard notamment de la richesse de son sous-sol, des opportunité business dans le domaine des équipements, des services, de l’agriculture, de son niveau d’éducation et de sa stabilité institutionnelle.

Pour Convergence

Jean-Noël BLANC

Chef du service économique (Direction Générale du Trésor) – Ambassade de France au Ghana

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